Après 500 kilomètres, dont les fameux 120 de piste, 2 entrées et 2 sorties de pays et un traversier, nous entrons en Argentine à 21h40, 20 minutes avant la fermeture de la douane. Ouf, ce soir nous dormirons à nouveau à Rio Gallegos, près de notre station fétiche. Nous ferons les courses demain. Et oui, les passages en douanes se font avec le moins de nourriture possible ce qui nous complique la vie.
Les courses faites, les bonbonnes de gaz remplies - pour la dernière fois du voyage peut-être – et c'est une journée de route monotone qui nous attend.
Nous arrivons fatigués (on a même étudié en roulant c'est pour dire) à San Julian. Nous y visitons la réplique du bateau de Magellan, le Victoria, seul navire à avoir bouclé le tour du monde. Occasion de rafraichir nos connaissances sur le sujet pour nous même et les enfants et de se prendre en photo à côté du petit monsieur (il mesurait 1m50) qui a réalisé de grandes choses, même si en réalité il n'a pas terminé le premier tour du monde puisqu'il est mort en route.
Le pendant de la mythique Ruta 40 – déroulant de sublimes paysages à couper le souffle – c'est la mythique Ruta 3 – déroulant un unique, ennuyeux et interminable paysage de pampa monotone. La route est si droite qu'on peu étudier et faire les carnets de bord sans même être remués à l'arrière. Heureusement, qu'il y a la musique pour rompre la monotonie et surtout, la carotte au bout de la route : Punta Tumbo. Nous sommes partis très tôt ce matin, aussi nous arrivons en début d'après-midi sur les lieux. Après avoir mangé un morceau, nous partons dire bonjour à quelques 500'000 pingouins de Magellan. Nous sommes attendrit par ce spectacle unique. Des miliers de drôles d'oiseaux en smoking nichent, caquettent et se dandinent à deux. Et oui, c'est la période de la couvée et au fond de chaque nid creusé dans le sable durci se trouve un à deux oeufs. Vous dire si c'est madame ou monsieur qui couve ? Nous n'avons pas soulevé les plumes pour savoir. Mais un couve, un autre monte la garde ou part avec une démarche de Charlie Chaplin se sustenter dans l'océan. Après quelques heures, nous retournons au camping car, recharger les batteries caméra qui chauffent tellement les sujets sont mignons. Comme nous dormons ici ce soir, nous retournons juste avant la tombée de la nuit dans le parc, tout seuls. Façon de parler, car s'il n'y a plus de visiteurs, le demi-million de pingouins lui se fait bien entendre. Les mâles qui n'ont pas encore trouvé chaussure à leur pied, font de petits combats de bec ou des cris de fond de gorge qui ressemblent à s'y méprendre aux ânes qui braient. A 20 heures, le soleil se couche et le parc ferme. Nous partons vite nous réfugier au chaud dans notre maison roulante. Le vent souffle mais étouffe à peine les bruits de cette énorme et si adorable colonie.
En passant par Trelew nous prenons des rendez-vous pour la santé de notre compagnon de voyage à quatre roues qui sera révisé par ici, regraissé par-là et nettoyé un peu partout la semaine prochaine. Mais très vite nous reprenons la route vers Puerto Madryn où nous attendent les baleines.
Tôt ce matin - les enfants dorment encore - nous terminons les 10 kilomètres restants jusqu'à Playa Canteras qui est, paraît-il, l'endroit où l'on voit le mieux les mammifères marins depuis la côte. Au détour d'un virage, nous apercevons les plages et de gros rochers à peine à 10 mètres du bord. Peut-être sommes nous à marrée basse. Mais très vite nous comprenons que lesdits rochers sont tout bonnement des grosses baleines; les baleines franches australes. Elles sont là. Par dizaines et si proche. On entend leur souffle. Incapables de rester à l'intérieur, nous courons sur les graviers. Nous sommes comme des enfants; excités, ravis, émerveillés. Jamais nous n'aurions imaginé que l'on puisse voir parmi les plus grands mammifères de la planète d'aussi près. Le vent cinglant nous rappelle assez vite à la réalité. Nous
sommes en pyjama dehors et on se caille. Vite nous rentrons prendre un petit déjeuner avec vue sur les baleines... Rien que ça.
Etudier, ce n'est pas toujours facille, mais si même les baleines s'en mêlent, alors cela devient impossible. Heureusement, nous avons déjà décidé de rester ici plusieurs jours. Nous resterons finalement 6 jours suivant le même scénario quotidien; à 6h00 le souffle des baleines nous réveille. Elles sont en ce moment avec leur baleineau de 1 ou 2 mois et passent très proche du bord, leur apprenant à nager, à filtrer l'eau. Pendant environ 2 heures nous sommes tous en pyjama sur la plage, y compris les autes voyageurs un peu plus loin. Les yeux cernés de la nuit mais pétillants de bonheur devant le spectacle. Au bout de deux heures elles s'éloignent un peu, nous laissant le temps de souffler pour prendre notre petit déjeuner, avant que les baleineaux fassent leur show de sauts retournés hors de l'eau ou tapant leur queue et leur nageoire caudale sur le plat de l'eau... avant de se reposer, fatigué, sur le dos de leur maman...
Durant la journée, on les voit au loin, observant leur souffle typique en forme de coeur. On en profite pour étudier avec les enfants et discuter avec les voyageurs que nous rencontrons : Pierrick et Esther (leur site) qui voyagent en voiture depuis le Québec, Ula et Mick (leur site) que nous revoyons encore une fois - après Cuzco et Ushuaïa - et pendant plusieurs jours, Gilbert et Catherine (leur site) qui ont voyagé pendant 1 an et retournent en France une semaine avant nous. Il y a aussi Olivier, Fabienne, Benoît et Avril sur la route des Amériques depuis 2 ans et pour assez longtemps encore (leur site), Lise et Hervé les spécialistes du coin et notre aventurière première classe Véronique, qui voyage depuis 3 ans déjà dans la formule 1 des campings cars avec un scotish adorable : Dream.
En fin d'après-midi le spectacle recommence. Les baleines et leur petit reviennent tout au bord de la plage. Et là c'est le spectacle des queues levées et de roulades dans l'eau. Un soir, une en particulier, vient si proche que nous croyons qu'elle va s'échouer. Mais pas du tout. Elle nous montre son ventre en tournant sur elle-même. Sa queue reste en l'air parfois pendant plus de 20 minutes. Puis elles se mettent à filter l'eau et nous voyons fanons et langues remonter des gorges immenses.
Chaque soir nous nous endormons au clair de lune et au souffle des baleines, nous demandant comment nous allons bien pouvoir nous arracher à un endroit aussi incroyable.
Après un peu de logistique à Puerto Madryn, nous roulons maintenant sur Punta Ninfas. Sur la piste, les freins lâchent tout bonnement; un tuyau du système de freinage est rompu. Rien de mieux pour nous donner confiance dans le véhicule. Il ne reste que 15 kilomètres de piste à plat... alors on y continue à faible allure.
Nous arrivons au bord de la falaise, d'une hauteur d'environ 70 mètres, et contemplons avec Ulla, Mick et Lise une vue panoramique étourdissante.
Nous passons une nuit très peu reposante. D'abord, une fois la nuit tombée, Natacha se met à flipper déraisonnablement à propos de la falaise juste à côté. Le vent qui fait tanguer notre camping car et la panne de frein de la journée n'aident certainement pas à la raisonner. Elle nous voit déjà emportés par
un pan de la falaise qui s'effondre ou poussés dans le vide par le vent à cause des freins défaillants... Gilles va, quant à lui, passer 3 bonnes heures à essayer d'attraper un passager clandestin que nous avons transporté avec nous depuis la Playa Canteras à plus de 80 kilomètres d'ici. Il s'agit en fait de
"cuis" qui ressemblent plus à des hamsters et qui ne sont pas très farouches. Il réalise avec lassitude que le cui en question est lui même accompagné de Madame Cui. En plus, ils circulent dans le camping car et ont élu domicile dans le tiroir de Théophile. Verdict : 3 slips troués en quelques minutes... En plus pas n'importe lesquels : Spiderman, Pokemon et les dinosaures. Théo ne sera pas content... Gilles attrape assez facilement le mâle qui voulait faire le malin – typique - et le garde prisonnier sous un gros saladier. La femelle, elle, reste bien plus prudente et ne s'aventure pas dans ses sorties. Typique aussi. Tant pis, nous continuerons demain.
Après une matinée de devoirs, nous nous habillons chaudement car le vent souffle très fort, et partons observer les éléphants de mer. Il faut d'abord escalader la falaise en surplomb au début, équipée d'une corde en guise de garde corps. Le reste de la descente est aisée et dès nos premiers pas sur la plage de petits galets nous rencontrons un premier éléphant. C'est tout d'abord la taille qui nous impressionne. Nous nous en approchons très prudemment car nous avons été avertis qu'ils peuvent être vindicatifs et rapides malgré leur apparente molesse. Plusieurs mâles se prélassent, soulevant un peu la tête à notre passage, remuant à peine le corps. Leur yeux ne sont pas très beaux. Adaptés à la vision sous-marine, on dirait de grosses billes livides et aveugles une fois hors de l'eau.
La plage est lunaire. Coincée entre la falaise et les vagues qui dévoilent lentement des rochers habillés d'algues vertes odorantes. sauvage, la plage est parsemée de cadeaux de la mer. Algues vertes, mousses blanches, restes de coraux oranges ou pourpres, étoiles de mers séchées et ossements blanchis d'éléphants de mer ou d'oiseaux marins. La marche est un peu fatigante dans ces galets roulés des milliers de fois par le ressac mais nous sommes pris par l'ambiance.
De temps en temps un meuglement nous rappelle que nous devons nous écarter pour éviter la rencontre trop brutale avec un éléphant. A gauche au bout d'une très longue courbe, nous apercevons Mick et Ula, contemplatifs, et nous les rejoignons, subjugués par le spectacle. Un harem est là en contre-bas. Peut-être 15 mètres nous en séparent à peine. Personne ne dit mot. Nous sommes tous là assis à regarder l'ordre social d'un harem de lions de mer. Le mâle dominant, très facile à reconnaître tant il dépasse en taille tous les autres individus, protège ses femelles des plus jeunes mâles qui tentent de lui prendre sa place. Il ondule ainsi massivement d'un bout à l'autre de la plage. Chassant tantôt assaillant qui
arrive par les rochers, tantôt l'autre qui attaque par l'eau. Arrivée sur place, il écrase l'une où l'autre des femelles pour lui rappeler obéissance. Si un petit a le malheur de se trouver en train de têter, il arrive qu'il meurt sous la masse. La différence de taille entre les mâles et les femelles est surprenante. Le dominant mesure peut-être 5 ou 6 mètres et lorsqu'il se dresse au tiers de son corps pour intimider ses rivaux, ou nous mêmes, il doit bien nous dépasser d'un mètre. Il pèse 1 ou peut-être deux tonnes. Les femelles, qui ont donné naissance et allaitent depuis plusieurs mois, ont fondu, elles mesurent à peine 2 mètres et ne pèsent plus "que" 400 kilos. Le spectacle dure des heures et nous restons assis à observer. Nous pourrons même voir un accouplement et pouvons affirmer que aussi incroyable que ce soit, ça n'est pas romantique du tout. La femelle, qui peut-être n'en peut plus de se faire assaillir tout la journée, émet des cris qui ressemblent à d'énormes rots caverneux. Elle se retourne pour essayer de se libérer. Le mâle lui tombe dessus et l'écrase de tout sa masse. Il lui mord le crâne souvent jusqu'au sang et elle finit par accepter l'étreinte démesurée. La mâle la fait basculer sur le côté et fait son oeuvre en émettant lui aussi des beuglements pas très glamour. Gilles est content; question glamour, il a encore une sacrée marge...
Nous repartons de la plage. Ravis d'avoir assisté à un tel moment de vie animale sauvage, si près et d'une telle intensité. Mais même si l'on dit que la nature est bien faite, nous avons la curieuse impression que les droits de la femelle sont ici bafoués au vu et au su de tout le monde.
Demain nous reprendrons la piste jusqu'à Trelew, à 80 kilomètres, il nous faut donc trouver une solution pour les freins. Finalement une vis servira de "bouchon" sur le tuyau défectueux. Nous freinerons donc sur trois roues. C'est plus qu'il ne nous en fallait.
De leur côté, les enfants, qui voulent nourrir avec un morceau de pomme le cui que Gilles a attrappé la nuit précédente, le laissent s'échapper. Alexandre, qui le retient par la queue, se fait mordre au passage. Le cui, affolé, se précipite dans le moteur du van de Mick et Ulla. Ils partent rouler quelques kilomètres pour essayer de l'en déloger. De notre côté, nous sommes ravis puisque Madame cui a décidé de quitter le navire par une porte laissée ouverte. Monsieur est en vadrouille avec Mick et Ulla, et les freins sont réparés... Nous aurons enfin une nuit tranquille... jusqu'à 2 heures du matin, où des grignotements nous confirment que Monsieur et Madame cuis sont de retour. Nous essayons à nouveau de les attraper mais en vain... Dur dur. On se console avec les freins.
Après l'école nous partons cette fois-ci explorer la partie droite de la plage. La marche est un peu plus longue. Un autre harem s'y est formé et le même scénario s'y répète. Nous restons un peu plus en retrait. Toujours fascinés par ce qui se passe. Toute la petite famille mattonlesvoiles regarde, se gorge de chaque image, de chaque minute qui passe sur cette plage. Est-ce parce que la fin du voyage approche ? Est-ce parce que la vue est si superbe ? Nous voulons pourtant tous profiter au maximum de ces moments forts et uniques.
Ce soir nous dormons à la stations YPF de Trelew où des très chaudes, très longues et surtout très propres douches nous attentent pour le bonheur de tous... juste avant que les camionneurs n'arrivent.
C'était prévu, mais cela nous ennuie toujours aussi royalement de passer une journée entière au garage. Et celle-ci d'autant plus que nous avions pris rendez-vous il y a 10 jours, sommes arrivés à 8h00 pile ce matin avec une petite liste de 6 choses à réparer - toutes prévues à l'avance - et qu'après avoir commencé à travaillé sur le camping car à 17h30, nous repartons à 20h00 avec seulement 2 choses de faites. Bon, ne nous plaignons pas, ils ont au moins réparé les freins. Cela ne fait qu'ajouter à notre maintenant longue expérience des garages Fiat qui sont tous aussi nuls les uns que les autres.
On se console à reprenant une longue douche au YPF – toujours avant que les camionneurs n'arrivent. En plus nous sommes dans des draps et des couettes que nous venons de faire laver. L'un et l'autre sont rares en voyage, mais alors les deux en même temps c'est carrément exceptionnel.
Cette fois-ci – et nous en sommes très tristes par avance - Monsieur et Madame cui n'auront aucune chance. Finis les pièges pour essayer de les attraper vivants. Les tapettes en acier fonctionneront très bien.
Nous espérions faire laver et polisher le camping car aujourd'hui, histoire de lui redonner un aspect acceptable avant le grand retour. Le lavage est très médiocre et malheureusement le polishage ne sera pas possible. De plus, le lavage révèle une couche pas très uniforme de gras jaunâtre voir grisâtre. Sous la poussière, la crasse.
Nous prenons rendez-vous pour après demain auprès d'un préparateur de voiture qui nous inspire vraiment confiance et en profitons pour aller visiter le musée paléontologique qui a un sacré air de ressemblance avec le Royal Tyrell Museum au Canada.
Aujourd'hui en Argentine, ce n'est pas Noël, mais les rues désertées y ressemblent quand même un peu. Pas une personne dans les rues, pas un commerce ouvert. C'est férié pour cause de recensement national. Toute l'Argentine à l'arrêt pendant 24 heures. Difficile à croire. Et pourtant, aucun n'a le droit de sortir avant que les recenseurs ne soient passés. En fin de journée nous partons sur Gaiman, petit bourgade Galloise au charme certain, non loin de Trelew. Nous espérions que les commerces et surtout les réputés salons de thés celtes soient ouverts plus tard dans la journée, mais nous rentrons bredouilles. Tout est vraiment fermé.
Tout au long de ce voyage - et en Argentine aussi malheureusement - nous avons bataillé pour obtenir un service bien fait. Les garages, les démarches, les réservations, tout est toujours folklorique et met à l'épreuve nos nerfs peu indulgents de petits suisses que nous sommes. Mais ici, c'est tout le contraire. Nous allons passer deux jours dans un garage où le travail est fait à merveille. Le camping car en ressort comme neuf. En plus, l'accueil de Guillermo est sans précédent. Il nous autorise à passer la nuit dans le garage, nous remet les clefs de la porte, nous propose les clefs de sa voiture tout neuve, et nous prépare même un asado pour le soir. Son épouse Esther et sa fille Tanya nous rejoignent et nous passons une soirée très amicale.
Alors petit coup de pub, si vous en avez marre de votre véhicule jaune et poussiéreux allez au Taller Hernandez, rue Soberania Nacional, vous ne reconnaîtrez pas votre voiture.
Ce matin, nous trainons un peu trop avant de tenter de re-visiter Gaiman. Lorsque nous arrivons, c'est la pause de midi. Comme partout ailleurs celle-ci dure jusqu'à 16h00. Tant pis. Nous nous ne visiterons pas la ville. Nous avons tous trop envie de vite retourner voir les baleines de Puerto Madryn, et lorsque nous y arrivons, nous sommes ravis de voir que plusieurs de nos amis voyageurs sont là.
S'il y a des moments qui marquent plus que d'autres dans un voyage, cette semaine en fera partie sans nul doute. Les journées sont superbement rythmées par le spectacle des baleines qui sautent entièrement plus au large ou qui naviguent sereinement à quelques mètres du bord. Les "petits" baleineau viennent se reposer sur leur mère. On les entend gargouiller, souffler et même chanter. Le bruit du plat des nageoires nous parvient immédiatement et nous réveille. Chaque matin, à peine le soleil fait-il sont apparition sur l'océan que nous sommes attirés sur la plage magique. Tout est parfaitement tranquille. Seul le crissement de nos pas dans les galets ronds suspend le silence. Le vent lui siffle la même mélodie. Douce ou forte.
Pour compléter ces jours de vrai et reposant bonheur, nous sommes en compagnie de gens très agréables. C'est avec Véronique (et son chien Dream !), Olivier, Fabienne et leurs enfants, Ula et Mick et bientôt Marylin et Vincent que nous observons les mamifères marins, entre deux parties de pétanques, guettant le saut d'un baleineau et courant chercher les appareils photos, toujours avec une seconde de retard... Nous avons fait une croix sur l'école; c'est perdu d'avance ici. Dans ces moments là, par la magie des liens qui se tissent si spontanément et profondément entre voyageurs, on a le sentiment de vivre un moment à part.
Nous emportons de Canteras de belles photos et une idée de ce que doit être le bonheur.
Il est temps de dire au revoir à Marylin et Vincent, après une dernière partie de pétanque évidemment. Cela ne va pas sans un pincement au coeur. Nous les avons rencontré si souvent durant ce voyage qu'on a presque l'impression de quitter quelqu'un de la famille. Alors on si dit à bientôt sur un autre contient, et partons vers Balneario El Condor.
35 000 nids de perruches sont nichés à Balneario El Condor sur 12 kilomètres de falaise. Il n'en faut pas plus pour nous convaincre de rester ici quelques jours. De plus, la plage est à deux pas et nous sommes seuls dans ce petit village désert hors période estivale. Nous rions en les observant car elles piaillent plus fort quand nous nous approchons, tournent autour des parapentistes, et migrent en ville le soir ! Vont-elles y boire un verre ?
Nous avons commencé à ranger le pamking car. Il faut préparer le retour en bateau, départ prévu le 24 novembre, dans une dizaine de jours... Non finalement le départ est repoussé au 6 décembre... On aura donc droit à Noël et nouvel an au milieu de l'atlantique. Grimaldi, qui a le monopole des roros sur cette ligne, fait des siennes et ce n'est qu'après insistances, emails et téléphones que nous obtenons une place sur un bateau plus tôt, celui du 17 novembre. Au lieu de 3 semains, nous n'avons maintenant plus que 7 jours pour arriver à Buenos Aires - à 1 000 kilomètres d'ici -, faire la paperasse administrative, les valises, les paquets, tout planquer - les vols ont lieu à gogo - monter la paroi de séparation, démonter le porte-vélo, donner tout ce qui ne revient pas avec nous, remodifier les assurances pour notre retour qui se fait plus tôt, reconfirmer la rentrée scolaire des enfants, faire les achats pour la traversée, prévoir les occupations pour les enfants, laver le frigo, rendre visite à des voyageurs que nous avions rencontrés au Pérou et qui sont maintenant dans la périphérie de Buenos Aires et accessoirement... visiter la ville. Heureusement, le voyage nous a appris à rester zen...
AU SECOURS !!!!!!!!!!!!!
Carnet de route précédent
Les voyageurs nous ont fait une description assez maussade de Buenos Aires. Misère, vol à la tir, circulation folle. Aussi nous arrivons assez tendus. Mais nous comprenons très vite qu'en réalité la ville est plutôt bien organisée, très verte et plutôt jolie... Elle semble européenne et dégage une impression de déjà vu; en passant par la très connue Avenida 9 de Julio, l'avenue la plus large au monde, nous avons la sensation de remonter les Champs Elysées.
En bifurquant sur le photogénique Obelisco, nous arrivons sans aucun souci au Buquebus, station de départ des traversiers à destination de l'Uruguay. Mais surtout, c'est un parking couru des voyageurs en camping car qui peuvent y laisser le véhicule tranquillement le jour et y dormir la nuit en attendant leur bateau en partance pour l'Europe ou ailleurs dans le monde.
Notre première préoccupation est d'aller finaliser les papiers avec Grimaldi car nous n'avons toujours aucune confirmation écrite du changement. Après un rapide passage par le quartier du Microcentro, assis devant le bureau de la secrétaire, nous sommes très soulagés de voir nos noms sur le plan d'occupation des cabines du bateau et autant soulagés de constater que les démarches sont
Soulagés, nous sortons du bureau et tombons nez à nez avec les Cinq Doigts de la Main, la famille française avec enfants avec qui nous espérions justement faire le trajet de retour. Mais leur bateau est reporté. Bien dommage (leur site).
Nous finissons par visiter la Plaza de Mayo avec sa Casa Rosada, palais du gouvernement. La ville est jolie. Pas extraordinaire, mais on s'y sent très bien. Notre voyage s'achève et nous marchons un peu penauds dans les rues. Les bras ballants. Comme si nous venions de recevoir un coup sur la tête. Comme si cette réalité là venait de nous assommer. Oui, le voyage s'achève. Oui nous avons réalisé notre rêve et à bien y réfléchir, cela nous laisse KO.
RETROSPECTIVE SUR L’ARGENTINE
Ne nous parlez plus de l'Argentine comme d'un pays. C'est une nation. C'est un continent. Les rencontres y sont multiples, chaleureuses et fières. Les paysages y sont très variés et époustouflants, la vie animale y est sauvage et pourtant si proche. Les chutes d’Iguazu, les missions, le Perito Moreno, la Patagonie, la jungle, le maté, les baleines... Il faudrait une vie pour visiter et comprendre ce pays. Nous n'avions "que" 3 mois... L'Argentine a gravé en nous un souvenir authentique. Comme ses habitants.
Finaliser les démarches avec Grimaldi, trouver des Euros pour les frais sur le bateau, avancer sur le web, marcher dans les rues, tout nous semble impossible. Nous sommes bien à cette fin de voyage, mais elle paraît rester encore totalement abstraite.
Le Parque 3 de Febrero, ou Bosques de Palermo – les bois de Palermo - est un peu à Buenos Aires ce qu'est le Central Park à New York. Nous nous y mêlons aux joggeurs, rollers et marcheurs en louant des vélos déglingués. Magnifique. Les arbres, surtout en ce printemps, sont époustouflants. Et une ambiance très agréable règne entre vendeurs d'orangeade et promeneurs.
Nous rejoignons ensuite l'Hippodromo Argentino où des courses ont lieu toutes les demi heures. Nous n'en verrons qu'une et d'un peu loin, car, tout néophytes que nous sommes, nous croyions que les
chevaux feraient un tour complet du terrain. Atmosphère des années folles, mais familial. Le Gran Premio Nacional n'aura lieu qu'à 18 heures. Comme nous sommes des gens pressés (nous avons un bateau à prendre nous...) nous n'y resterons pas. Sympathique, l'hippodrome vaut le détour pour son ambiance mais ne nous laisse pas un souvenir mémorable. A la sortie nous passons devant le Campo Argentino de Polo où se dérouleront dans dix jours les championnats mondiaux de Polo que nous ne verrons pas et ça c'est bien dommage... car, petit rappel, nous avons un bateau à prendre :o)
Après un bon repas de viande argentine dans le quartier de Las Canitas, nous visitons le Jardin Japones qui semble avoir sa zénitude bien ébranlée par le publique latin Portègne. Tout le monde parle fort, les enfants courent partout. Pittoresque à contre-sens de la sérénité recherchée. Clin d'oeil bridé.
Pour finir cette journée en beauté - on se dépêche car on a un bateau à prendre - nous partons voir une Milonga, place où se danse du tango. Soirée typique Portègne de tango. Nous choisissons la Milonga Abierta de la Glorieta à Belgrano, car nous n'avons pas vraiment les habits pour aller dans une soirée plus chic, dans un club renommé. Avant 19 heures quelques personnes prennent des cours de tango sous un kiosque. Après 19 heures, lorsque le crépuscule se fait plus dense, que les lampdaires diffusent leur lumières orangées, les couples arrivent, de tout âge, de toute taille. Mais le niveau lui est unique; très bon. Des moments comme ceux-là, n'existent qu'en rêve (voir le sentiment du monde).
La Feria de San Telmo n'a rien de plus ni de moins que les autres foires, marchés artisanaux ou marchés aux puces du monde. A ceci près qu'ici la Feria foisonne de clichés. Certains stands sont assez banals, d'autres rivalisent de créativité. Nos yeux sont attirés par tant de couleur et d'originalité. Beaucoup de jeunes à l'âme bohème baba cool tentent aussi de vivre de bracelets, ou autre objets artisanaux facilement transportables. Au marché aux puces, les brocanteurs se sont déguisés en Ali Baba, Mandarin Chinois ou Jack Sparrow pour égayer leur échoppe. Chaque petit espace resté libre est occupé maintenant par des statues vivantes, des montreurs de marionnette ou des sosies de Carlos Gardel. Le temps est suspendu et nous sommes des enfants émerveillés dans l'arrière cours d'un cirque.
Nous croisons par hasard les "5 Doigts de la Main". Nous discutons longtemps autour d'un verre à la terrasse du Bar "La Pétanque". Original pour des Français !
Arrivés à la Boca, un quartier pauvre, nous parcourons le Caminito où l'ambiance est moins authentique. Tout est fait et surfait pour le touriste. Dans deux rues, les façades des maisons sont couvertes de couleurs vives. Les touristes exécutent quelques pas de tango avec un professionnel pour rigoler ou se font prendre en photo dans une position acrobatique. Nous nous laissons porter et trouvons finalement assez sympa. A quelques rues il y a le stade de la Bonbonera, où le club des Boca Junior – le plus titré au monde avec la Milan AC - a vu naitre Maradonna qui y a un siège à vie dans la tribune présidentielle. A quelques rues, il y a la pauvreté. A quelques rues, il y a des endroits déconseillés aux touristes, même en pleine journée. L'autre côté de Buenos Aires.
Ce soir nous retrouvons les « 5 doigts de la main ». Ils nous invitent dans l'appartement qu'ils ont loué avant leur retour prochain vers l'Europe. Les enfants, autant que nous, sont ravis de cette rencontre qui ne nous laisse qu'un seul vrai regret. Celui que nous ne fassions pas le trajet en bateau ensemble. On se console en se disant que nous aurons l'occasion de nous revoir de l'autre côté.
Aujourd'hui nous allons rentre visite à Remy, Danièle et Candice à Tigre. Nous les avions rencontrés au Pérou où ils faisaient une pause de quelques mois en sac à dos durant leur voyage en bateau qui dure depuis 5 ans. Quelques heures à parler de tout, de rien, de voyage et d'avenir. Sympathique moment où nous découvrons un peu ce qu'est la vie en voilier. Les garçons n'ont pas perdus de temps pour repérer sur un quai branlant un bout de nylon auquel était encore attaché un flotteur et un hameçon. Pas perdu de temps pour vite aller demander un reste de poisson à un pêcheur pour faire office d'appât. Pas perdu de temps non plus pour nous rapporter, tout fiers, un poisson, puis un deuxième. Et bien sûr, pas perdu de temps pour que Théo tombe dans l'eau. Heureusement que jsuqu'aux tibias... Nous quittons nos marins avec émotion en nous demandant qu'est-ce qui fait qu'entre voyageurs le courant passe si vite et si intensément. Comment peut-on créer en quelques instants une relation qui, dans le contexte d'une vie "normale", prendrait peut-être des années. La magie du voyage ? A bientôt un jour peut-être sur la terre.
Ah oui c’est vrai, nous avons un bateau à prendre... Et le départ du bateau pour demain se confirme. On met donc à jour le site, on fait les valises, on prépare le camping car pour embarquer. Et on ne réalise pas que demain nous quitterons ce continent et quitterons petit à petit ce voyage...